L’ironie | Définition & exemples
À moins d’être un saint, vous avez forcément déjà eu envie de répondre à une remarque stupide et/ou inappropriée en signifiant le contraire de ce que vous vouliez vraiment dire, le tout avec une bonne dose de sarcasme…
Cette façon de s’exprimer porte un nom : c’est l’ironie.
Plan de l’article :
L’ironie : définition
Le terme d’ironie désigne au sens large une manière spécifique de s’exprimer rentrant dans le champ des sous-entendus. Cependant, et on le sait moins, il s’agit aussi d’une figure de style à part entière.
Définition de l’ironie (figure de style)
L’ironie consiste à dire le contraire de ce que l’on pense, généralement sur un ton humoristique ou sarcastique.
Il s’agit d’une figure de style appartenant à la famille des figures d’opposition.
Ironie def : exemple
— Oh, quelle superbe paire de lunettes ! C’est sûr que ça te rend tout de suite plus intelligent…
Explication :
Sans même en connaître le contexte, on peut déceler dans cette réplique une ironie mordante : le locuteur sous-entend que la présence de lunettes (prétendument un signe extérieur d’intelligence dans l’imaginaire collectif) ne rend pas le récepteur qui les porte moins stupide. Il s’agit d’un propos purement ironique.
L’ironie et l’antiphrase
L’ironie est étroitement liée à une autre figure de style d’opposition, l’antiphrase, qui consiste à écrire le contraire de ce que l’on pense.
Toutefois, une antiphrase n’est pas toujours ironique : elle peut également faire l’objet d’un euphémisme.
L’ironie peut être plus ou moins évidente ou subtile.
Néanmoins, pour qu’elle soit correctement saisie, le récepteur du propos ironique doit pouvoir saisir facilement le décalage entre ce qui est dit et ce qui est signifié. Si cela n’était pas le cas, l’ironie manquerait totalement son objectif.
À l’oral, cela passe par la forme du propos, bien sûr, mais aussi par les intonations adoptées, voire par l’utilisation d’interjections typiquement ironiques, telles que hein ou hum.
Figure de style ironie
— Hum, ça a l’air délicieux ces petits grumeaux dans la pâte ! Je me demande pourquoi tu n’as pas encore ouvert une crêperie…
Par ailleurs, le concept d’ironie renvoie souvent à un propos en particulier, mais peut concerner une situation dans son ensemble.
Dans ce cas, on trouve un écart entre ce qui est censé se passer en théorie (selon toute logique admise ou selon la morale) et ce qui se produit dans les faits.
Exemples d’ironie
- Un gendarme qui se fait arrêter pour excès de vitesse.
- Un pompiste se retrouve en panne d’essence.
- Un chat fait une sieste les quatre fers en l’air sur une pelouse dans laquelle est planté un panneau « Interdit à nos amis les félins ».
- Une étudiante qui souffre de bananophobie (phobie des bananes) est contrainte de travailler chez un primeur pour payer ses études.
Les utilisations concrètes de l’ironie
L’ironie, autant comme technique d’expression que comme figure de style, présente plusieurs utilités.
Ainsi, on l’utilise dans les discussions orales (en particulier dans les conversations informelles), mais aussi à l’écrit, et notamment dans la littérature. Dans ce dernier cas, l’ironie sert souvent à délivrer des messages. Néanmoins, cela n’est pas sa seule utilité.
L’ironie est efficace, entre autres :
- pour apporter un effet comique à un propos ou un fait désagréable,
- pour délivrer une critique de manière détournée,
- pour dédramatiser une situation vexante ou désespérée,
- pour pointer du doigt des injustices, des contradictions ou des absurdités afin de mieux de les dénoncer.
De plus, l’ironie est souvent à double tranchant, surtout si elle est sarcastique : adorée par les uns, elle peut aussi être très mal perçue par les autres… En effet, sa réception dépend des personnalités en présence et du contexte.
Notons toutefois que l’ironie peut être tout à fait bienveillante, si elle est utilisée pour apporter un trait d’humour, et sans intention de viser qui que ce soit.
Exemple d’ironie bienveillante
— Wow, quel temps superbe, tous en maillot de bain ! (en présence d’un temps exécrable)
Différence entre ironie et sarcasme
L’ironie et le sarcasme sont deux notions relativement proches l’une de l’autre en termes de sens. Néanmoins, leurs utilités sont différentes, et elles ne se situent pas tout à fait au même endroit sur le spectre de l’humour.
- L’ironie permet d’exprimer le contraire de ce que l’on pense vraiment en y adossant un effet comique ou critique.
Elle repose en partie sur l’effet de contraste entre ce que l’on s’attendrait à entendre et ce qui est réellement formulé.
L’ironie peut être sarcastique, mais ce n’est pas obligatoire. - Le sarcasme, quant à lui, est une forme d’ironie qui se veut mordante, voire blessante.
La plupart du temps, elle sert soit à la critique acerbe soit à la moquerie, et vise à piquer au vif la personne à qui elle est destinée : elle est donc moralement discutable.
On parle parfois d’ironie sarcastique pour la désigner.En somme, le sarcasme est indissociable de l’idée d’ironie (c’est-à-dire que tous les sarcasmes sont nécessairement de nature ironique), tandis que toute ironie ne rentre pas forcément dans le champ du sarcasme…
Exemple de sarcasme :
— Bravo, tu peux être fier de toi… (pour une mauvaise action ou une réalisation ratée accomplie)
Ironie : quels synonymes ?
En tant que figure de style, l’ironie ne dispose d’aucun synonyme parfait, car le terme désigne un procédé rhétorique bien spécifique.
Néanmoins, selon la coloration qu’elle prend et le type d’ironie, on peut la rapprocher de certains termes tels que :
- l’humour,
- la malice,
- la moquerie,
- la plaisanterie,
- la raillerie,
- le sarcasme,
- la satire,
- la taquinerie…
Ironie synonyme : exemple
— Tu es bien apprêtée, aujourd’hui, dis-moi : une merveille, ce sac poubelle que tu portes !
— Roh, c’est bon, arrête tes sarcasmes !
Différents types d’ironie
Que ce soit dans la vie de tous les jours ou dans la littérature, on distingue plusieurs types d’ironie :
- l’ironie verbale,
- l’ironie situationnelle
- l’ironie dramatique,
- l’ironie tragique.
L’ironie verbale
L’ironie verbale consiste à dire une chose à quelqu’un tout en sous-entendant le contraire à travers les mots et le ton employé.
L’ironie verbale est très souvent sarcastique.
Ironie verbale : exemple
— Oh, c’est sûr que tu es la plus adroite d’entre nous : c’est seulement le troisième poteau que tu percutes aujourd’hui…
L’ironie situationnelle
Avec l’ironie situationnelle (aussi appelée ironie de situation), la dynamique est légèrement différente : il ne s’agit pas tant de propos que d’un ou plusieurs événements qui, mis en perspective avec des attentes ou des paramètres opposés, surprennent par leur incongruité.
Ironie situationnelle : exemple
Un hacker célèbre se fait pirater tous ses mots de passe et sa véritable identité est exposée en place publique.
Explication :
Le gimmick de l’« arroseur arrosé » est typique de l’ironie situationnelle.
Ici, l’ironie réside en ce qu’un hacker se fait prendre à son propre jeu et subit à son tour ce qu’il fait subir aux autres.
L’ironie dramatique
L’ironie dramatique a surtout trait à la littérature et au théâtre.
Elle survient quand le lecteur ou le spectateur sait quelque chose qu’une personne ignore.Elle est idéale pour créer un effet comique, de tension ou de surprise, captant ainsi l’attention du public, qui a l’impression d’avoir un « coup d’avance ».
Ironie dramatique : exemple
Dans Œdipe Roi de Sophocle, le spectateur sait à un moment donné qu’Œdipe, qui enquête sur le meurtre du Roi Laïos, est l’assassin, mais lui-même l’ignore.
L’enjeu n’est alors plus de découvrir qui a tué, mais comment Œdipe va comprendre qu’il est le meurtrier qu’il traque et comment il va réagir face à cette révélation stupéfiante…
L’ironie tragique
L’ironie tragique, née de la tragédie grecque, est une forme d’ironie dramatique, mais elle place encore le curseur un cran plus haut : un personnage, sans le savoir, prononce des paroles ou commet des actes qui vont à son encontre ou à celui de la personne qu’il veut défendre.
L’exemple d’Œdipe Roi relève également de l’ironie tragique.
En effet, Œdipe creuse sa propre tombe en se lançant dans la traque du meurtrier de Laïos, puisque ce meurtrier n’est autre que lui-même.
Ironie : exemples
Dans la vie de tous les jours, les exemples d’ironie — qu’elle soit verbale ou situationnelle — ne manquent pas.
La littérature, ainsi que la fiction en général, se sont, elles aussi, appuyées sur l’ironie pour développer des intrigues qui se veulent divertissantes et captivantes.
Autre exemple d’ironie dramatique : Roméo et Juliette
Nous avons déjà eu l’occasion de parler d’Œdipe Roi comme exemple d’ironie dramatique (et tragique), mais Roméo et Juliette est certainement plus connu encore.
En effet, la pièce de Shakespeare met en scène la mort simulée de Juliette. Celle-ci, désespérée de ne pouvoir vivre son amour avec Roméo au grand jour en raison de la mésentente chronique des Montaigu et des Capulet et de la volonté de sa famille de la marier à un autre, boit une potion qui la plonge dans un sommeil si profond qu’il prend des airs de mort.
Néanmoins, elle n’en avertit pas Roméo au préalable. Celui-ci, la croyant réellement morte et étant follement épris d’elle, prend à son tour un poison… qui lui se révèle mortel pour de vrai.
L’ironie dramatique est d’autant plus grande ici qu’une lettre avait été expédiée afin de prévenir Roméo des intentions de Juliette. Cette lettre n’arrivera malheureusement pas à destination avant que l’amoureux transi commette l’irréparable.
Dans cet acte final, l’ironie dramatique qui se révèle au spectateur ne fait qu’accentuer le pathos de la scène tout en rendant la chute plus marquante.
Exemple d’ironie socratique
L’ironie socratique (du nom de Socrate, considéré comme le père de la philosophie) est un type d’ironie qui a trait à la philosophie, et qui consiste à faire croire que l’on ignore une chose pour mieux laisser une personne la lui expliquer, mais qui vise en réalité à faire prendre conscience à cette même personne de la faiblesse de son raisonnement pour mieux la convaincre.
Exemple d’ironie socratique dans la vie de tous les jours
Imaginons que votre beau-frère vantard vous rebat les oreilles avec sa nouvelle voiture qui consomme peu d’essence alors que, en tant qu’ingénieur automobile, vous savez pertinemment que la consommation de son moteur est loin d’être parmi les meilleures du marché.
Plutôt que de vous lancer dans des explications techniques que nous savez vaines (car vous avez déjà vu la mauvaise foi de votre beau-frère à l’œuvre), vous lui posez de nombreuses questions sur les caractéristiques techniques du véhicule et ses performances réelles, et ce alors que vous connaissez ces données sur le bout des doigts. Après l’avoir laissé dérouler fièrement ses anecdotes, vous lui glissez sur un ton détaché que vous avez fait davantage de kilomètres avec votre véhicule personnel, qui n’est plus de la première jeunesse, à réservoir et trajet équivalents.
Félicitations, vous venez de pratiquer l’ironie socratique pour lui rabattre son caquet !
Cette technique demande de feindre la naïveté.
Ainsi, l’ironie socratique peut être considérée comme une forme d’art oratoire.
Ironie : exemples littéraires
Une poignée d’auteurs est particulièrement connue pour la verve ironique qui jalonne ses textes.
C’est notamment le cas d’un auteur des Lumières bien connu, Voltaire, à tel point qu’on parle d’ironie voltairienne.
Exemple d’ironie voltairienne
Le texte le plus célèbre de Voltaire sur ce registre est certainement Candide ou l’Optimisme.
En effet, le précepteur Pangloss affirme à longueur de temps au jeune Candide et à qui veut l’entendre que « tout est au mieux » et qu’ils vivent « dans le meilleur des mondes possibles »… alors que toute l’histoire est jalonnée de catastrophes mettant en exergue la corruption morale et la bêtise des hommes.
Molière s’est également illustré dans ce domaine.
Exemple d’ironie avec Molière
Dans sa pièce Le Médecin malgré lui, Sganarelle, un homme paresseux formé aux travaux manuels, se voit contraint de se faire passer pour un docteur.
Or, son manque de compétence — connu dès le début du public — passe totalement inaperçu pour ses patients, malgré des gestes maladroits et des diagnostics farfelus.
Pire, ils en redemandent !
L’ironie du sort : une expression idiomatique courante
L’ironie du sort est une expression toute faite qu’il n’est pas rare d’entendre lorsqu’un événement contraire à ce qui était attendu se produit, souvent de façon brutale, laissant planer un sentiment de stupéfaction et d’incrédulité.
Elle est associée à une situation absurde et/ou cruelle et plaide volontiers le caractère aléatoire ainsi qu’injuste du destin.
Ironie du sort def : exemple
Un homme qui vivait dans la rue depuis des années se voit confier par un notaire qu’il vient d’hériter d’une très grosse somme d’argent de la part d’un grand-oncle inconnu au bataillon.
La joie qu’il éprouve en l’apprenant est telle… qu’il fait une crise cardiaque et meurt dans la foulée, sans jamais avoir profité de ses gains.
L’ironie du sort rappelle que la vie est aussi imprévisible qu’illogique, se moquant des mérites et des efforts de chacun.